Carnival of souls

Pour des raisons inconnues, ce bar avait tendance à lui rappeler sa cellule à Azkaban. L’endroit était sombre, humide, sentait une odeur atroce de moisissure et d’alcool et, de plus, était aussi mal fréquenté que la prison. Autrement dit, Ian s’y sentait presque comme chez lui. Il fallait dire qu’après 10 ans passés dans une cellule de la sinistre prison, il ne se sentait pas encore vraiment à son aise dans les lieux lumineux et très fréquenté. Il avait en permanence l’impression d’être observé par tout le monde, qu’ils se faisaient tous des messes basses à son sujet dès qu’il détournait le regard. Cela n’était peut-être que de la paranoïa induite par une légère agoraphobie vouée à disparaître avec le temps mais pour l’instant, cela lui donnait plus envie de fuir la civilisation que de s’y plonger. Le plus dramatique dans l’histoire était probablement le fait que dans ce bar reculé de l’Allée des Embrumes, il reconnaissait plusieurs têtes pour les avoir croisé lors de son long séjour à Azkaban. Des voleurs et des bagarreurs pour la plupart d’entre eux.

L’endroit n’était de loin pas plein, à peine plus de 7 ou 8 personnes, en plus de la serveuse. Un petit groupe discutait entre eux, deux autres jouaient aux cartes. De son côté, Ian était installé à une table à l’écart. Il avait passé ses longues jambes sous la table avant de les poser en les croisant au niveau des chevilles sur la chaise vide en face de lui. Ainsi affalé, il se contentait de regarder la salle d’un air absent avec pour unique compagnie un verre et une bouteille de whisky dont le niveau descendait dangereusement.

La soirée aurait pu être tranquille. Il aurait pu simplement rester là jusqu’à la fermeture puis, prenant le reste de sa bouteille avec lui, tituber jusqu’au studio minable qu’il louait non loin avant de s’affaler, complètement ivre, sur son lit, exactement comme il le faisait de plus en plus souvent depuis sa libération, moins de 3 semaines plus tôt. Mais le destin en voulu autrement en la personne d’un abruti décérébré que Ian connaissait pour l’avoir justement lui-même envoyé à Azkaban des années plus tôt qui s’était mit en tête de séduire une des rares femmes présente à la manière des Hommes de Neandertal.  

Agacé de voir le Cro-Magnon se faire de plus en plus insistant envers la demoiselle visiblement de moins en moins à l’aise, Ian finit par se lever pour lui dire de se calmer.

La première réponse qu’il reçu fut un poing, énorme, droit dans la tronche. La seconde fut une phrase à l’élocution rendue difficile par l’alcool.

C’est pas tes affaires ! Moi j’s’rais toi, j’f’rais pas mon malin mon gars ! Les Aurors, on aime pas trop ça ici !

Se remettant du coup qui l’avait quelque peu sonné, Ian essuya sa lèvre en sang d’un revers de la main avant de passer machinalement le bout de sa langue sur sa lèvre tuméfiée en se plantant droit devant l’autre abruti qui, bien qu’il devait faire le double de son poids, faisait bien une tête de moins. Rien d’étonnant à cela, Ian culminant à plus d’1m90.

Pourquoi tu m’insulte ?, demanda Ian en prenant un faux air pêné.  

Après une seconde d’immobilité, il répliqua soudainement de manière rapide mais efficace. Un premier coup de genou dans les parties sensibles. Une fois l’Imbécile plié en deux, il lui attrapa la nuque et lui fracasser le nez sur son genou avant de l’achever en lui balançant un violent coup avec ses deux coudes droit entre les omoplates.

En moins de 2 secondes, le type était parterre, le souffle coupé et le nez en sang sous les regards effarés des autres clients.

C’est EX Auror du Con… Associe-moi encore une fois à ce Ministère et je fais de toi une chanteuse soprano !

De toutes évidences, le colosse avait comprit le message et après s’être péniblement relevé, il fit signe à son pote de l’aider à marcher et tout deux quittèrent le bar alors que Ian retournait à sa place comme si de rien était, retrouvant son verre qu’il vida d’un trait avant de le remplir à nouveau, reprenant sa posture avachie à moitié allongé, les pieds posés sur la chaise en face de lui.

mocking jay.

Accoudé au comptoir du Haunted Werewolf, Gavriil étudiait les ivrognes qui buvaient autour de lui. Sans aucun doute, ce bar était une véritable mine d'or. Il avait l'habitude de venir ici quand il avait besoin -ou juste envie- de glaner quelques informations ou de trouver un client pour la nuit lorsque, comme aujourd'hui, il n'avait pas beaucoup vendu. En ce moment il faisait froid, et personne ne s'attardait sur le Chemin de Traverse pour acheter des marchandises frauduleuses. Seuls ses habitués s'arrêtaient lui prendre les articles dont ils nécessitaient pour telle ou telle potion ou malédiction. Mais bon, peu de rentrée d'argent et son petit frère Nikita avait grand besoin d'un nouveau manteau. Pour l'instant, le russe lui prêtait un des siens, mais il nageait dedans...

Après avoir remballé son étalage de fortune, il était donc rentré chez lui déposer sa recette de la journée et se changer. Pas question d'aller pêcher un client dans cette tenue... Il enfila rapidement des habits plus appropriés et quelques minutes plus tard, ce fut, aux yeux des passants, une belle jeune fille qui sortit de l'immeuble décrépit, un petit sac à main accroché à l'épaule et des talons hauts qui claquaient sur le trottoir. Gavriil faisait toujours exprès de s'habiller avec des tenues aguicheuses, non pas spécialement pour se mettre en valeur mais pour attirer du monde. C'est fou comme les gens avaient tendance à parler plus facilement à une fille sexy avec un décolleté qu'avec un garçon habillé en pull et col roulé. Cependant, il veillait à ne pas tomber dans le vulgaire non plus. Il aimait choisir ses vêtements avec soin, et il détestait qu'on le prenne pour une fille facile. Les clients, c'était lui qui allait les choisir, et jamais l'inverse.

Il s'était rendu dans l'allée des Embrumes, là où les langues se déliaient le mieux et où les porte-feuilles étaient faciles à voler, et ses pas l'avaient menés dans ce bar mal famé. Il avait poussé la porte et s'était installé au comptoir avant de commander une vodka et de s'installer à son aise. Il lui fallait une cible riche de préférence, et qui travaille au ministère. On pourrait croire qu'il était au mauvais endroit pour ça, mais Gavriil savait qu'il ne s'était pas trompé. Il rencontrait régulièrement des gens pro-gouvernement dans le coin, et ceux-ci, souvent saoul, donnaient leurs informations sans même qu'il ait besoin d'insister.

Il allait se décider à aller vers un des hommes lorsqu'une espèce de brute épaisse se dirigea vers lui. Au départ, il se contenta de l'ignorer en sirotant son deuxième verre de vodka -après tout, il n'était pas le premier à essayer de l'amadouer avec des façons d'ours en rut- mais il se fit de plus en plus insistant. Il se mit même à vociférer que son ignorance le blessait dans son amour propre -comme s'il en avait un- et son ton se fit dangereusement menaçant. Le jeune homme, sous des airs qu'il voulait calme, commençait à appréhender la suite. Il se débrouillait très mal dès qu'il s'agissait de sors et question physique... Soyons nets, il n'aurait pas l'ombre d'une chance. Vu sa stature et celle de l'inconnu... Il envisageait de sortir du bar et espérant semer le balourd en chemin quand quelqu'un interrompit le type en question.

Gavriil regarda la scène en se reculant un peu -il n'avait pas très envie de recevoir un dommage collatéral- et lorsque l'ours fut à terre, il attrapa son verre -il n'allait quand même pas laisser sa vodka là, on allait lui piquer sinon- et se dirigea vers l'inconnu qui s'était remis à sa place comme si rien n'avait jamais eu lieu. Il tira une des chaises libres et s'assit à côté, souriant à l'homme qui venait de l'aider. Il lui semblait l'avoir déjà vu, et en cherchant un peu dans la masse de ses souvenirs, il se rappela qu'il avait lu un  article à son sujet, datant de plusieurs années, chez un juge qui gardait toutes les affaires qu'il avait traité. Une sombre histoire de meurtres s'il se souvenait bien, mais à vrai dire il s'en fichait bien.

-Salut, commença-t-il avec un beau sourire charmeur. Merci de m'avoir aidé, c'était sympa.

Il vida son verre d'un trait, et décida de commander une bouteille. Il avait décidé qu'il appréciait l'homme en face de lui -en plus il avait des yeux magnifiques- alors puisqu'il en avait pour un moment, autant préparer la boisson.

-Je t'avais encore jamais vu ici. Je te sers un verre ? Demanda-t-il en désignant la vodka qu'il venait de ramener. Je te l'offre.

En temps normal il n'invitait jamais personne mais pour le coup il pouvait bien faire une exception. Après tout, sans lui, il aurait pu avoir des problèmes et il avait horreur de ça, parce que qui disait problèmes disait attention et il se refusait à attirer l'attention du gouvernement, il avait bien trop à perdre...

     

Carnival of souls

Même s’il n’en montrait rien, l’autre abruti lui en avait fait morfler avec son coup de poing. Alors qu’il regagnait sa table, Ian pouvait sentir son cœur pulser dans sa lèvre tuméfiée qui continuait de légèrement saigner. Il en avait vu d’autres certes, il avait même enduré un Doloris dans sa courte carrière d’Auror, mais cette petite douleur lancinante était vraiment agaçante. Il n’avait plus qu’une envie, l’anesthésier à coup de whisky, ce à quoi il s’attela avant même de s’être assit en attrapant son verre et en le vidant d’une traite avant de s’installer.

Il se servait un nouveau vers quand il vit du coin de l’œil une silhouette blonde et élancée fondre droit sur lui pour s’installer à ses côté sans faire mine de lui demander son avis. Ian ne masqua pas son long soupire bien audible et agacé mais ne décolla pas les yeux du liquide ambré qu’il faisait tourner dans son verre pour autant.

De rien, finit-il par répondre machinalement en vidant à nouveau son verre.

L’alcool commençait à faire doucement son effet, enfin. Mais Ian gardait tout de même les idées encore relativement clair. C’était une chose qui l’agaçait particulièrement. Il avait beau boire plus que de raison dans l’espoir de se retrouver dans cet état léthargique absolu reconnu de tout ceux ayant déjà prit des cuites monumentales, il gardait toujours les idées à peu près clair, peu importe son état, même en se retrouvant à monter les étages menant à son studio à 4 pattes. Peut-être était-ce un effet secondaire quand on passait 10 ans à lutter contre les effets néfastes de la présence permanente de Détraqueurs autour de soi après tout, peut importe l’état physique, plus rien ne parvenait à altérer vos pensées.

Ce ne fut que quand la blonde lui proposa un verre que Ian posa enfin son regard sur elle. Lui non plus ne l’avait jamais vu dans le coin et pourtant, c’était presque devenu son adresse secondaire depuis sa libération. Il fréquentait en tout cas suffisamment ce bar pour savoir qu’il n’y avait que 2 genres de femmes qui osaient s’y aventurer. Les criminelles, fortes, se faisant respecter et généralement capable de mettre un homme au tapis et les prostituées. Après la scène à laquelle il avait participé, et vu la tenue sexy de la blonde, Ian la catalogua dans la seconde catégorie.

Sans dire un mot, il fit glisser son verre vide devant la femme. Après tout, il n’allait pas dire non à un verre, ce n’était pas vraiment dans ces nouvelles habitudes, un comble pour lui qui, 10 ans plus tôt, ne buvait presque pas d’alcool.

Attendant qu’elle le serve, il l’observa plus attentivement. Elle était plutôt intrigante. Elle aurait pu être réellement très jolie mais il émanait d’elle un petit quelque chose légèrement masculin. Probablement une impression donnée par sa mâchoire assez carrée, et ses traits marqué. Son buste semblait lui aussi assez étroit et elle avait de grande main. En fait, à bien y regarder, la jeune femme était plutôt du genre androgyne. Ian était persuadé quand sans artifices et avec une tenue plus neutre, il serait bien incapable de dire s’il avait à faire à une femme ou à un homme. C’était plutôt déroutant, en tout cas pour lui.

Tu devrais garder ta baguette à portée de main quand tu viens dans des endroits pareil, finit-il par lui conseiller tranquillement. Il n’y aura pas toujours une âme charitable pour sauver tes miches.

D’autant que de toutes évidences, elle n’avait pas un mac pour assurer ses arrières vu que Ian n’avait vu personne venir la tirer de là.

mocking jay.

Le soupir que l'inconnu eut la délicatesse d'émettre en le voyant arriver n'empêcha Gavriil de s'asseoir. Au contraire, ça ne fit qu'affirmer son impression : cet homme était intéressant. Et intrigant aussi. Il décida qu'il l'aimait bien. Alors qu'il le servait généreusement de vodka, il sentit son regard sur lui. Le russe esquissa un sourire amusé.

-Qu'est ce qu'il y a ? Je suis bizarre ?

Il ne savait pas si c'était dû à son léger accent, à son travestissement ou juste à sa façon d'être, mais beaucoup de gens lui affirmaient qu'il était étrange. Enfin, ça n'avait rien d'étonnant d'un côté puisqu'il s'évertuait la plupart du temps à faire semblant d'être quelqu'un d'autre juste parce qu'il n'aimait pas qu'on sache des choses sur lui. En tous cas ça l'amusait plus que ça ne le vexait. Il profita de l'instant pour détailler à son tour son interlocuteur. Ian Harrington, s'il se souvenait bien -et sa mémoire ne lui faisait jamais défaut. Il avait lu un article au sujet de sa libération, peu de temps auparavant. La petite rixe lui avait laissé une lèvre un peu abîmée, et il eut une pensée désolée pour lui. Mais bon, dans sa carrière d'auror, il avait dû avoir des blessures pires que ça. Sans compter les blessures de l'esprit infligées à Azkaban.
Il poussa le verre plein vers l'ancien détenu, remplit le sien et le vida d'un trait avant de laisser échapper un petit rire en entendant sa remarque.

-Oh ça, t'inquiète pas, je l'ai toujours sous la main. Malheureusement elle ne m'est pas de très utile....

A part quelques sorts mineurs, il ne savait pas faire grand chose avec sa baguette. Eden avait entreprit de lui donner quelques cours de temps en temps, mais pour l'instant elle se contentait surtout des sorts basiques. Tout ce qu'il pourrait faire avec, c'était de la planter dans l’œil de son adversaire, mais encore fallait-il y arriver.

-Mais c'est gentil de te préoccuper de moi, fit-il avec un grand sourire.

La plupart des gens ne se souciaient pas vraiment de ce qui pourrait lui arriver. En fait à part Eden et sa famille, il n'y avait personne pour s'inquiéter pour lui. Pas que ça le dérange bien sûr, après tout, c'était lui qui fuyait la proximité avec les autres. Le contact physique, aucun problème. Mais dès qu'il fallait en venir à se dévoiler, il se sentait mal à l'aise et esquivait les questions. A part de temps en temps. Comme là. Peut-être parce qu'il sentait que Ian ne chercherait pas à trop en savoir sur lui. Il faisait peut-être fausse route, mais pour l'instant ce n'était pas très important. Et puis, quand c'était lui qui choisissait de se dévoiler, ça allait. Ce dont il avait horreur, c'était qu'on lise en lui ou qu'on devine des choses à son sujet. Il avait toujours peur que les gens découvrent le monstre qu'il cachait au fond de lui et qui sortait toutes les pleines lunes. Il se força à écarter cette pensée. Il détestait penser à ça.

-Et qu'est ce qui t'amène ici ? Juste une envie de passer le temps ?

D'après l'article de La Gazette, ça ne faisait pas très longtemps qu'il avait été libéré, il ne devait donc pas avoir beaucoup à faire, les gens ayant tendance à écarter les anciens prisonniers de la société.

     

Carnival of souls

La question de la blonde fit légèrement pouffer Ian qui reporta son attention sur son verre. Elle en avait de bien bonnes mine de rien.

T’as regardé autour de toi ?, lui demanda-t-il en esquissant un vague geste de la main pour désigner la salle. Tu vois beaucoup de personne qui ne soit pas bizarre ici ? Cet endroit est une véritable foire aux monstres, ponctua-t-il tout en se comptant lui-même dans sa description. Ce bar attire toutes les raclures de caniveau de notre chère bonne société magique de Grande-Bretagne. Qui se ressemblent s’assemblent il parait…

C’était un constat désolant, plutôt négatif, des lieux mais Ian ne pensait pas exagérer dans ses propos. Personne se trouvant dans cette salle n’était clean, tous avaient un passif, qu’ils soient réels ou, comme dans le cas de Ian, erroné. Mais dans le fond, cela ne changeait rien. Ici, ils étaient tous à la même.

Quand la blonde le remercia de se préoccuper de lui, Ian poussa un nouveau soupire. Bien sûr qu’il se préoccupait d’elle. Les choses auraient pu gravement dégénérer pour elle. Combien de fois, dans sa carrière, Ian avait-il vu des prostituées battues au sang ou même mortes suite à de mauvaises rencontres comme ce type ? Sauf qu’il n’avait pas envie que ça se sache, il ne voulait pas d’attache et encore moins de l’étiquette du bon type, le gentil boy scout volant au secours des plus faibles. Non, définitivement pas.

Laisse tomber, dit-il en récupérant son verre. Ça a rien à voir avec toi, j’ai juste pas envie de voir toute la Cavalerie débarquer ici parce que tu te serais fait agresser c’est tout.

Ce qui n’était pas totalement un mensonge. Effectivement, moins ils voyaient les Aurors, mieux il se portait désormais. Ils ne l’avaient pas soutenu, aussi bien avant que pendant ou après sa condamnation, il leur en voulait réellement. Il n’avait pas plaisanté en disant à l’autre tête d’abruti qu’il ne voulait plus jamais être associé de près ou de loin au ministère. Encore moins à celui en place.

Blondie semblait pas vraiment décidée à aller voir si le ciel était plus dégagé sous d’autres cieux, restant bien installée à ses côtés. Si elle espérait être tombée sur un client, c’était plutôt mal barré. Le reste de son dernier cachet en date venait de partir dans sa bouteille de whisky. Il songea qu’il faudrait peut-être qu’il le lui dise, histoire qu’elle ne perde pas son temps pour rien mais elle le prit de vitesse.

Où veux-tu que j’aille d’autre ? Les ex-taulards assassins ne sont pas vraiment les bien venus dans les bars bien sous tout rapport du Chemin de Traverse.

Ian s’en était vite aperçu. Si sa présence avait été tolérée en journée ou les rares fois où il avait été accompagné, la dernière fois qu’il avait voulu passé la soirée dans un de ses pubs, il avait fini par s’en aller sous les menaces des autres sorciers. Ici au moins, même si on lui reprochait son boulot d’auror, sa réputation de meurtrier lui assurait généralement la tranquillité plutôt que les ennuis.

Ecoute… La compagnie m’ennuie pas mais tu perds ton temps si tu espère gagner ta soirée avec moi ce soir, finit-il par lâcher gentiment en se tournant à nouveau vers elle. J’ai pas de boulot fixe et le peu de cash qu’il me restait sur moi, se trouve ici, expliqua-t-il en agitant sa bouteille de whisky. Je suis pas du tout un potentiel client. Et même sans ça, je ne suis vraiment pas intéressé.

Il n’y avait rien de dur dans sa voix. A aucun moment il ne fit mine de vouloir rabaisser la blonde en lui montrant qu’il avait deviné son boulot de prostituée. Au contraire, il lui avait parlé avec franchise, tout simplement d’égal à égal. Après tout, personne n’était mieux qu’un autre dans ce bar lugubre.

mocking jay.

Même si Gavriil était d'accord avec la remarque de l'ancien détenu, il ne put retenir une légère grimace au mot « monstre ». Il savait bien que cette constatation n'avait rien à voir avec le fait qu'il soit loup-garou mais il n'avait pas pu s'empêcher de penser à la créature qui vivait en lui, et il n'aimait tout ce qui lui rappelait qu'il n'était pas humain. Après, c'était plutôt exact... Aucun honnête homme ne s'aventurait par ici, tout le monde en avait conscience.

-C'est vrai, sourit-il. Mais soit pas trop dur avec eux. C'est peut-être des raclures de caniveaux mais mieux vaut être raclure que moins que rien non ? Au moins on est quelque chose.

En tous cas, c'est comme ça que lui voyait les choses. Il fallait bien se convaincre qu'il y avait pire quand on était en bas de l'échelle... Et même réussir à tirer une certaine fierté de sa condition. Ça, il n'avait jamais réussi. Mais il avait connu des prostituées fières de leur de leur métier, et le russe les avait respectées pour ça. Lui, la seul chose qui le rendait fier, c'était que son travail faisait subsister toute sa famille.

Il releva les yeux vers son interlocuteur et eu un petit sourire en l'entendant. Il disait peut-être l'inverse, mais Gavriil était persuadé qu'il n'avait pas fait ça uniquement à cause des aurors. D'ailleurs, ils ne seraient pas venus pour si peu ? Ça faisait longtemps qu'ils ne s'aventuraient dans le quartier qu'en cas d'extrême urgence... En tous cas ça faisait un bon moment qu'il ne les avait pas revus. Et puis à vrai dire, il se fichait pas mal des raisons qui l'avaient poussé à faire ça. Le fait était qu'il l'avait aidé, gentillesse ou non, et c'était ce qui comptait.

Sa réponse attira l'attention du russe. Oui, évidemment que les fraîchement débarqués d'Azkaban n'étaient pas reçus avec les fleurs et les honneurs chez les honnêtes gens. Ça n'avait rien d'étonnant, peu de personnes avaient très envie de rencontrer un ancien assassin au coin d'une rue. Le blond détailla Ian, hésitant. Il avait l'air droit, aussi incongru que ça puisse paraître, et il ses premières impressions étaient rarement fausses. Et puis, il avait le profil parfait pour travailler au Helly Heaven. Il savait qu'ils avaient bien besoin d'un peu muscle pour leur prêter main forte et qu'Eden faisait confiance en son jugement. Il allait ouvrir la bouche quand l'ex auror le devança, le faisant éclater de rire par ses paroles. Oui, sans aucun doute il n'était pas méchant sinon il n'aurait pas pris la peine de lui expliquer son point de vue.

-Non, je pensais pas vraiment à ça pour tout t'avouer, fit-il en rigolant encore un peu. Mais tant mieux si la compagnie t'embête pas, j'aurais un endroit sympa à te montrer. Et promis, ça n'a rien à voir ni avec le sexe, ni avec la drogue. Je te dirais bien que ça n'a pas de rapport avec l'alcool mais pour le coup... Ce serait faux.

Il se leva, attrapa sa bouteille de vodka et fit quelque pas vers la sortie avant de se retourner vers lui :

-Oui, je sais que t'as pas envie de me suivre, mais je te jure que tu le regretteras pas. Et puis t'auras droit à des verres gratuits si tu viens...

Il esquissa un sourire. S'il acceptait, ce serait une épine en moins dans le pieds d'Eden -et dans le sien par la même occasion ! Parce que les caisses à décharger, c'était dur à porter quand on ne savait pas se servir d'une baguette...- d'autant plus qu'il venait de lui confirmer qu'il n'avait pas de travail. Difficile de refuser une offre d'emploi après des années de prison...

   

Carnival of souls

Avec eux ?, reprit Ian en observant la blonde en fronçant les sourcils. Tu ne nous compte pas dans le tas ?

Pour sa part, dans le fond, Ian ne voyait plus vraiment de différence entre ces criminels habitués des lieux et lui. Malgré lui, il était de leur monde maintenant, il allait devoir s’y faire. Après tout il devait se rendre à l’évidence, cela prendrait des années pour qu’on commence enfin à l’accepter à nouveau parmi les citoyens. Et même là, il resterait un meurtrier à leurs yeux. La foule était généralement la moins clémente, s’attendre au pardon de toute une population était que pure utopie.

Tu me trouve dur ? Je ne faisais qu’une simple constatation, ajouta-t-il en haussant nonchalamment des épaules. Mais peut-être avait-il froissé ou blessé la blonde en parlant d’eux ainsi après tout. Ian ne se faisait pas grandes illusions quant à la manière dont la société le percevait mais ce n’était pas forcément le cas de tout le monde. Peut-être que son interlocutrice gardait un semblant d’espoir elle.

Et voila que la blonde, Ian continuant de l’appeler ainsi dans sa tête à défaut de connaître son nom, lui proposait de changer de lieu alors qu’il venait de lui dire ne pas être intéressé. Toutefois, elle lui assura bien vite que cela n’avait rien à voir avec le sexe. D’accord. Quand elle lui parla de drogue, Ian ne pu s’empêcher d’avoir une grimace. Il n’avait jamais touché à la drogue et n’avait l’intention de s’y mettre. Aussi fut-il soulagé que l’idée de la demoiselle ne soit pas non plus en rapport avec ça.

L’argument des verres gratuits amusa Ian plus qu’autre chose. Seigneur, il avait donc déjà l’air alcoolique à ce point-là ? Ça voulait dire qu’il était encore plus une épave que ce qu’il avait craint. Rien de vraiment étonnant à cela, les quelques fois où il était allé voir ses parents depuis sa libération, sa mère n’avait eu de cesse de le supplier de se raser et de se couper les cheveux. Selon elle, et elle n’avait probablement pas tout tort, une apparence plus soignée l’aiderait à mieux se réintégrer. Mais encire fallait-il qu’il ait vraiment envie de se réintégrer dans ce monde ou plus rien ne semblait logique. La corruption suintait de chaque pierre de l’édifice du Ministère de la magie. 10 ans à vivre reclus loin de tout et à son retour, il ne reconnaissait plus rien.

Prenant sa propre bouteille, Ian se leva et suivit la demoiselle. Après tout, vu la manière dont elle se défendait, il me risquait pas grand-chose. Ou alors de tomber dans une embuscade mais à quoi bon le prendre au piège ? Il n’avait rien sur lui ayant la moindre valeur.

Très bien je te suis mais tu pourrais me donner ton nom au moins quand même ?

mocking jay.

Gavriil eut un sourire à la réflexion de l'homme.

-Moi ? Non, je suis pas une criminelle... Juste une opportuniste, fit-il en levant la main qui tenait un porte-feuille qu'elle venait de dérober à un ivrogne hagard.

A vrai dire, le russe ne s'était jamais posé la question de savoir s'il faisait ou non parti des bandits qu'il fréquentait. Il vivait, tout simplement. Savoir dans quelle catégorie il se plaçait l'intéressait assez peu tant qu'il pouvait ramener de l'argent à sa famille. S'il avait à se placer quelque part, il se mettrait dans la classe « petit escroc » mais bon, ça n'avait pas d'importance. Tout ce qui lui importait, c'était de nourrir ses frères, ses sœurs et ses parents. Après, il n'avait aucun scrupule à profiter des gens qui avaient plus que lui, ça c'était indéniable. Mais pourquoi s'apitoyer sur des personnes qui se débrouillaient mieux ? Aucun intérêt.

-Non, pas spécialement. Mais tu es dur avec toi-même.

Enfin, ça ne le regardait pas. D'après Eden, lui aussi avait tendance à être dur avec lui-même alors il était sûrement mal placé pour faire cette remarque. Lui n'avait pas l'impression d'être ainsi... Mais d'après ses anciennes expériences, autant il était très clairvoyant pour ce qui était de lire dans les autres, autant lorsque ça le concernait il devenait étrangement aveugle. Quoique étrangement était un bien grand mot. Il savait parfaitement pourquoi il préférait fermer les yeux sur certains aspects de sa personnalité, mais ça il ne voulait pas y penser. Toutes ces pensées étaient soigneusement fermées à clef au fin fond de son cœur.

Apparemment, il avait trouvé les bons arguments -ou peut être Ian était il juste de bonne humeur- toujours était-il qu'il se leva et le suivit. Gavriil ne put s'empêcher d'avoir un sourire amusé en constatant que l'ex auror semblait aussi attaché à sa bouteille que lui. En même temps, si c'était tout ce qui lui restait d'argent, c'était plutôt normal.

Il fit quelques pas dans la rue sombre qui abritait le bar qu'ils venaient de quitter et resserra son manteau autour de lui, avant d'entendre Ian lui demander son nom. La réponse fusa, automatique. Il le répétait tellement qu'il finissait par le dire sans y penser.

-Gabrielle.

Il réfléchit tout en continuant à marcher. Il avait peut-être répondu de manière automatique, mais si Eden l'engageait il finirait fatalement par savoir son nom. Et son apparence puisqu'il ne se travestissait que rarement pour son service.

-En fait je m'appelle Gavriil. Mais pour le moment ce sera Gabrielle, ok ?

Pour l'instant, il était Gabrielle et il n'aimait pas qu'on utilise son vrai prénom lorsqu'il était en fille. Si un de ses clients habitués l'entendait il saurait son nom et comme ce n'était pas très courant  il était facile à retrouver. Or il préférait rester dans l'ombre. C'était plus sûr...

   

Carnival of souls

Combien de fois avait-il pu entendre ce genre d’argument ? Non je ne suis pas un criminel, il faut bien que je nourrisse ma famille etc Si on lui avait donné un gallion à chaque fois qu’il avait entendu une chose du genre, son compte en banque serait bien plus remplit qu’il ne l’était actuellement.

A une époque, Ian avait eu beaucoup de mal à comprendre ses gens. Maintenant…

Je n’ai aucune raison de me montrer tendre avec moi-même en même temps, répondit-il du tac-au-tac en coulant son regard sur la blonde avant de porter son verre à ses lèvres pour le vider.

5 minutes plus tard, il se retrouvait à suivre la blonde dehors. Ils devaient former un couple bien surprenant, chacun armé de sa bouteille, la blonde moulée dans sa tenue sexy et Ian avec son look de baroudeur. Mais après tout, ils étaient dans l’Allée des Embrumes, ici, personne ne regardait personne et ce genre de duo étrange étaient monnaies courante.

Ainsi donc elle s’appelait Gabrielle ? C’était étrange, Ian lui aurait plutôt donné un nom aux consonances plus étrangères. Elle avait des traits un peu slave, il l’avait imaginé venant de là-bas. Il aimait bien ce prénom mais plus dans sa version masculine, il trouvait que cela sonnait un peu trop virile, même féminisé, pour une femme. Mais après, cela restait son avis.

Il la suivait en silence tout en portant le goulot de sa bouteille de whisky à ses lèvres lorsque la jeune femme lui fit un aveu qui eu le mérite de le prendre de court. Il manqua de s’étouffer et du recracher sa gorgée en toussant, les larmes aux yeux et le souffle court. Ainsi donc, il avait vu juste ? La femme était en réalité un homme ? Il fallait avouer que la tromperie était bluffante, même lui était tombé dans le panneau.

Très bien, finit-il par répondre quand il fut en mesure d’aligner deux mots. Je te confirme que je susi définitivement pas intéressé par tes services… D’ailleurs, ça doit leur faire un sacré choc à tes clients quand tu te déshabille non ?

En tout cas lui, il en aurait eu un s’il avait décidé de ramener Gabrielle/Gavriil chez lui cette nuit. Dans son cas, une fois le choc passé, il aurait gentiment reconduit Gavriil vers la sortie mais Ian doutait fortement que beaucoup de clients du jeune homme, puisse ce qu’il en était ainsi, le prenne aussi bien qu’il ne l’aurait fait.

Et tu m'entraine où alors ?

mocking jay.

Les ruelles se firent plus larges et plus éclairées et fur et à mesure qu'ils quittaient l'allée des Embrumes, et ils finirent par traverser le Chemin de Traverse. Le Helly Heaven était à quelques rues de là. Il y était allé si souvent au cours de ces derniers mois qu'il aurait pu faire le chemin les yeux fermés. D'ailleurs parfois c'était tout comme, vu le brouillard à couper au couteau qu'il y avait à Londres... Mais ce n'était pas pour lui déplaire, puisqu'il adorait la brume. Ça donnait à la ville un aspect mystérieux et calme qu'il aimait bien.

Mais pour le moment, les nuages étaient hauts dans le ciel, et les rues bien éclairées par des lampadaires. Il faisait encore assez froid et il n'y avait pas grand monde. Le bar devait être peu bruyant pour une fois... Évidemment, il y avait toujours moins de monde quand il ne travaillait pas, le hasard était mal fait... Mais bon, il adorait son job alors même s'il se plaignait de temps à autre, il était heureux d'avoir trouvé Eden pour le faire devenir serveur.

Ian se contenta d'avaler une nouvelle gorgée de boisson en entendant son prénom, ce qui eut pour effet de faire sourire le russe. Il était vraiment égal à lui-même en toutes circonstances... Pensa-t-il fugacement avant de changer d'avis en le voyant manquer de s'étouffer. Devant son air ahuri, il ne put s'empêcher d'éclater de rire. Il n'était pas le premier à réagir ainsi mais il devait avouer qu'il trouvait toujours ça drôle de comparer les différentes réactions des gens. Enfin quand il pouvait éviter, il se gardait bien de dire qu'il était un homme lorsqu'il était travesti. En fait à part Eden, les seules personnes qui savaient que Gavriil était Gabrielle étaient ses clients. Et encore, pas tous puisqu'il couchait parfois en temps que Gavriil.

Il ria encore un peu en entendant sa question. Sa patronne lui posé presque la même un an plus tôt. Ce qui était légitime. Il pouvait tout à fait comprendre que ça puisse être un sujet d'interrogation...

-On n'est pas obligé de se déshabiller... Sourit-il, amusé. Mais oui, ça surprend...

Après c'était à lui de faire passer tout ça. Quand aux hétéros, généralement il sentait avant d'en arriver là qu'ils l'étaient et il éviter de s'y risquer, même s'il devait avouer s'être déjà trompé. Mais il savait partir sans provoquer de scandales -heureusement, sinon il aurait sans doute mal fini.

-Je suis quand même sûr que j'aurais pu te faire changer d'avis, fit-il plus par badinage que par réel persuasion.

Parce qu'en fait il s'en fichait pas mal puisqu'il ne comptait pas essayer.

-Je te l'ai dit non ? Répondit le blond en se tournant vers lui.

Ils étaient bientôt arrivés de toutes façons. Et puis déclarer qu'ils avaient quitté un bar pour un autre bar c'était un peu inutile. Il aurait fallu lui expliquer son intention et il comprendrait bien assez tôt et bien plus rapidement que s'il s'engageait dans une longue explication. Quoique. Plus rapidement... Ce n'était pas si sûr...

-Dans un endroit sympa, chantonna-t-il en levant la tête vers les étoiles et en reprenant une gorgée de vodka.

Vodka qui était meilleure au Helly Heaven soit dit en passant...

Carnival of souls

Les rues étaient particulièrement calmes ce soir, le froid devait y être pour beaucoup. Bien qu’habitué à la fraicheur, les cellules d’Azkaban ne comportant hélas pas le chauffage, Ian referma les pans de son long manteau qui avait connu des jours bien meilleurs pour se protéger un minimum de la bise tout en se demandant si Gavriil, puisse ce que tel était donc son nom, n’était pas entrain de royalement se les geler dans sa tenue sexy.

Mais t’as jamais eu d’ennuis ?, demanda-t-il avec un réel intérêt. La dualité de Gavriil/Gabrielle l’intriguait réellement et mille questions lui tournaient en tête alors qu’il avançait en l’observant, jetant juste de temps à autre un coup d’œil devant lui pour ne pas se prendre un lampadaire en cours de route. Je veux dire, j’imagine bien les mecs dans ce genre de bar se prendre pour les Dieux de la virilité et ne pas du tout apprécier de se retrouver avec un mec en déshabillant la fille sexy qu’ils ont ramené.

Parce que bon, Gavriil avait bien dû être parfois amené à se déshabiller non ? Ian lui-même n’aurait que très modérément apprécié la surprise alors certains crétins arriéré du bar de l’Allée des Embrumes, il ne préférait même pas y penser.

Il éclata d’un rire sonore et sincère quand Gavriil lui annonça qu’il était sûr qu’il aurait pu le faire changer d’avis et bu une longue gorgée à sa bouteille avant de lui répondre avec, enfin, un vrai grand sourire amusé et chaleureux qui changea instantanément toute sa physionomie, le faisant passer d’un type à l’allure peu engageante et froid à celle d’un gars séduisant et sympathique.

Non… Je t’assure que non ! Chacun mène sa vie comme il veut, perso je m’en contre-fou mais c’est quand même trop bizarre pour moi, expliqua-t-il en riant tout en désignant d’un geste vague la tenue de Gavriil.

Ian espérait ne pas vexer Gavriil, après tout le travesti lui était vraiment sympathique, il commençait vraiment à l’apprécier, c’était juste que ce n’était pas le genre de chose qui pouvait l’attirer ou l’exciter, tout simplement.

Et avec tout cela, Ian ne savait toujours pas où est-ce que son compagnon pour la soirée le trainait. Ian connaissait bien sûr les environs pour avoir maintes fois traversé Le Chemin de Traverse en long en large et en travers mais il n’avait pas d’idée sur la destination précise.

J’ai dû oublier de te dire que je déteste le suspens et encore plus les surprises, bougonna-t-il en buvant une nouvelle rasade. Il fallait dire que la dernière « surprise » accompagnée de semaines de suspens qu’il avait connu l’avait conduit tout droit à Azkaban pour 10 ans alors forcément, depuis il n’aimait plus trop ce genre de chose.

mocking jay.

Les rues défilaient au fur et à mesure qu'il marchait et le bar de sa patronne où il travaillait presque tous les soirs se rapprochait. Encore deux petites ruelles et ils y seraient... Le gens qu'ils croisaient se dépêchaient de trouver une source de chaleur, mais pour sa part, le russe se sentait bien. Un peu froid, il devait avouer, mais rien de trop insupportable. Il avait vécu pire question température. Bien qu'il eut tout de même hâte de rentrer dans l'établissement du Helly Heaven : il ne craignait pas le froid, mais il n'était pas contre une salle agréablement tiède. Enfin, ses jambes n'étaient pas contre surtout.

Il posa son regard sur Ian, peinant à retenir un sourire amusé en constatant qu'il le dévisageait avec curiosité, manquant de se prendre des passants ou des lampadaires. La dernière fois qu'on l'avait observé comme, ç'avait été un homme qui lorgnait le décolleté moulant qu'il avait choisi pour la journée. Mais bon, il doutait fortement que l'ancien détenu le lorgne pour les mêmes raisons. Il devait plutôt être intrigué vu son comportement. Toujours était-il que son attitude égayait Gavriil. A part sa famille et Eden, il ne fréquentait pas grand monde -ou du moins pas grand monde de durablement fréquentable- et mine de rien, ça lui changeait.

La question de l'ex auror fit de nouveau rire le jeune homme.

-Chez moi, on dit que les mystères ne restent des mystères que s'ils gardent leur quota de secrets, sourit-il. T'es pas d'accord ?

Pour être honnête, il avait déjà eu quelques ennuis bien sûr. Mais ce n'était pas aussi fréquent que ce qu'on pouvait penser au premier abord, pour la simple et bonne raison que le blond n'allait pas draguer n'importe qui. Généralement, il passait un petit moment à observer les personnes les plus aptes à subir son petit manège, en écartant celles qui semblaient trop machistes ou trop saoules. Ou trop pauvres évidemment. Après, lorsque c'étaient des inconnus qui venaient l'aguicher sans qu'il ne demande rien, là c'était une autre affaire. La plupart du temps, il s'en tirait plutôt bien. Il savait être diplomate et manipuler les ivrognes idiots qui traînaient dans les bars n'avait rien de difficile. Par contre, il y avait des dérapages de temps à autre... Que ce soit des tas de muscles qui n'appréciaient ps trop d'être repoussés -gentiment pourtant!- ou des personnes qu'il avait mal cernées et qui, en effet, prenaient mal la surprise. Jusqu'à présent il avait eu de la chance, il s'était toujours sorti de ces mauvaises passes. Mais bon, par mesure de sécurité, il préférait aller aguicher ses habitués que de trouver de nouveaux clients. Sauf quand il avait vraiment besoin d'argent.

Il aurait pu expliquer tout ça à Ian qui manifestement aurait bien voulu savoir comment il se débrouillait, mais Gavriil n'avait jamais trop aimé parler de lui. La réflexion de son interlocuteur le fit pouffer. Non en effet, pensa-t-il en le détaillant d'un œil amusé, s'il avait dû essayer de le séduire, Ian aurait certainement fait parti de ceux qui n'auraient pas cédé. Dommage, il avait l'air plutôt pas mal foutu...

-Tu me fais un peu penser à ma sœur, rigola-t-il en l'entendant bougonner. Sans vouloir te vexer bien sûr.

La petite dernière avait exactement la même tête quand Gavriil faisait semblant de lui voler le loukoum qu'elle se gardait pour la fin et qu'il lui faisait croire qu'il l'avait mangé. Il trouvait ça terriblement adorable. Mais à chaque fois il finissait par craquer. Heureusement qu'il était arrivé, sinon il aurait fini par ne plus pouvoir tenir sa langue...

-Ma surprise sera bien plus chaleureuse qu'une cellule d'Azkaban, je te rassure. Tu vois, c'est là que je t'amène.

Le blond désigna l'enseigne du bar, quelques mètres à peine devant eux. A chaque fois qu'il la voyait, il avait l'impression de rentrer chez lui...

Carnival of souls

Le seul mystère, c’est qu’il y ait des gens pour penser au mystère, récita-t-il de mémoire même s’il ne se souvenait plus qui était l’auteur de cette phrase qui lui était soudainement revenu en mémoire. Les mystères et les secrets, j’ai donné et ça m’a pas vraiment réussit, répondit Ian du tac-au-tac sans parvenir à réprimer une grimace.

C’était peut-être un peu idiot mais depuis qu’il était sortit d’Azkaban, Ian avait l’impression de développer une véritable phobie pour tout ce qui était surprises et autres mystères. Il espérait que cela finirait par lui passer mais pour le moment, l’Inconnu le rendait plus nerveux qu’autre chose.

Mais il laissa tout cela de côté pour reporter toute son attention sur Gavriil. Manque de bol, ce dernier semblait autant aimer parler de lui qu’Ian. Voila qui compliquait un peu la conversation étant donné que tout deux ne se connaissaient pas encore le moins du monde. C’est pourquoi, Ian resta un instant silencieux en buvant. Du moins jusqu’à ce que Gavriil reprenne la parole et ses dires manquèrent de peu à ce qu’Ian s’étouffe avec sa gorgée de whisky.

On l’avait déjà comparé à beaucoup de choses mais à une femme alors là, c’était une grande première. Enfin non, on l’avait déjà plus ou moins comparé à une femme, une fois, des années plus tôt et le type en question avait finit avec le nez fracturé et était reparti loin des douches collectives littéralement la queue entre les jambes.

A ta sœur ? A moins qu’elle soit beaucoup plus masculine que toi, en quoi je peux bien te faire penser à ta sœur ?, lui demanda-t-il après avoir réussit à retrouver sa respiration entre deux quintes de toux.

Et Ian n’en finissait malheureusement pas avec les surprises ce soir. Toutefois, quand il vit la devanture du bar, il se dit qu’il ne devait pas avoir grand-chose à craindre à priori. L’endroit avait l’air plus clean que le bar qu’ils venaient de quitter dans l’Allée des Embrumes. Mais ce n’était pas forcément une bonne chose. Si là-bas, tout le monde se fichait de voir Ian dans le décor, après tout ils étaient tous à la même niveau casier judiciaire, ce dernier se doutait d’être accueillit à bras ouvert par tout les habitués de ce bar-ci.

Tu m’as fais quitter un bar pour aller dans un autre bar… ? D’accord, pourquoi pas. Et je peux savoir pourquoi tu m’emmène ici exactement ? Tu comptes pas sur moi pour casser la gueule à d’anciens clients qui t’auraient mené la vie dur quand même ? Le premier sauvetage est gratuit mais pour les suivants, c’est payant, plaisanta-t-il à moitié en observant le bar alors que de la buée s’échappait d’entre ses lèvres.

mocking jay.

Ce n'était pas très étonnant que l'ancien détenu ne supporte plus les surprises, mais manque de chance, avec lui, il risquait d'être déçu. Gavriil adorait les mystères, c'était plus fort que lui.

Etant donné qu'il ne parlait pas trop de lui, le russe avait l'habitude de faire parler les autres à sa place. Pourtant cette fois il n'essaya même pas de poser ses questions habituelles pour meubler le silence qui s'était installé entre eux. Il sentait bien que Ian non plus n'était pas très bavard quand il s'agissait de dire des choses sur lui, et il ne pouvait l'en blâmer. Au contraire, il ne comprenait que trop bien. Parfois, il ne valait mieux pas déterrer ce qui sommeillait chez les autres... En tous cas, lui n'appréciait pas -mais alors pas du tout- qu'on soit trop curieux à son sujet et qu'on cherche à en savoir trop sur lui. Et puis, ce le blond n'avait pas peur des silences. Il aimait bien ces moments calmes où il n'avait pas à se casser la tête pour trouver quelque chose à dire. Il préférait profiter du moment présent et marcher, tout simplement sans rien faire d'autre.

Il ne put s'empêcher de sourire en entendant l'homme à côté de lui manquer de s'étouffer à sa remarque. Décidément, d'ici la fin de la soirée, il aurait réussi à le tuer avec sa bouteille ! Sa réflexion lui tira un rire joyeux.

-Non, Sonia n'est pas vraiment masculine ! Pouffa-t-il en pensant à sa sœur de six ans. Mais elle bougonne exactement de la même façon que toi. Bon après, question physionomie, là je dis pas pas qu'elle te ressemble, vous êtes un peu le jour et la nuit mais bon...

Le bar en face de lui, Gavriil n'attendit pas plus et s'engouffra à l'intérieur, savourant l'arrivée d'air chaud qui l'enveloppa comme un doux cocon. Il retrouva avec délice l'odeur familière de l'alcool et de présence humaine, ainsi que celle du bois sombre dans lequel les tables et le comptoir étaient faits. Il venait ici tous les jours voire plus, pourtant il ne se lassait jamais de l'atmosphère qui régnait dans cet établissement. Ce n'était ni mal famé, ni luxueux, mais il s'y sentait à l'aise comme nul part ailleurs. Peut-être était-ce dû à Eden, qu'il considérait un peu comme une sœur. Il aimait beaucoup la retrouver là et prendre son service tout en plaisantant avec elle. Elle l'avait embauché sur un coup de tête, après une discussion mouvementé entre eux deux la première fois qu'il avait mis les pied dans le bar -tout à fait par hasard il fallait bien l'avouer. Depuis il s'arrangeait pour ne jamais manquer son service. Sauf les nuits de pleine lune, mais ça c'était une autre histoire...

Il se tourna vers Ian, qui semblait s'interroger de sa présence ici. Gavriil pouvait tout à fait comprendre sa surprise, c'était assez bizarre de le faire changer de bar sans raison apparente. Sauf que lui en avait une bonne de raison...

-Non, pas vraiment, quémander des services aux autres c'est pas trop mon genre. Je préfère que ce soit les autres qui quémandent mes services... Mais c'est vrai que je t'ai fait venir ici pour rencontrer quelqu'un, sourit-il. Quelqu'un qui pourrait te filer du boulot. Si ça t'intéresse.

Il avait conscience que ce ne devait pas être évident de trouver du travail après avoir fait dix ans de prison. Alors certes, le job qu'il avait en tête n'était pas des plus palpitant, mais c'était déjà ça...

-Hé la patronne ! Héla-t-il en direction d'Eden, qui servait un client derrière le comptoir.

C'était censé être sa soirée libre, mais ce n'était pas la première fois qu'il se pointait alors qu'il était dispensé de travail, aussi s'approcha-t-il d'elle comme si de rien n'était.

Carnival of souls

Ian s’apprêtait à marmonner, avec une mauvaise foi des plus flagrante, qu’il n’avait rien d’un bougon mais eu la sagesse d’esprit de s’en empêcher à temps, comprenant de lui-même l’absurdité qu’aurait eu la scène.

Et de toutes manières, il était bien plus intrigué par les mystères de Gabrielle. Lui faire rencontrer quelqu’un ? S’était gentil mais Ian n’avait vraiment pas envie de « rencontrer quelqu’un » pour le moment. Sa vie était encore en chantier total alors il n’avait pas vraiment la tête à ce genre de choses en prime. Mais s’était le milieu de la nuit, il commençait à se les geler alors tant pis, la perspectives d’être à nouveau au chaud un moment était trop tentante pour faire demi-tour maintenant.

Arrivés à l’intérieur, Gavriil appela celle qui devait à priori être la propriétaire des lieux et Ian eu le plaisir, il fallait l’avouer, de voir une belle brune les rejoindre. En l’entendant appeler Gavriil mon petit loukoum, Ian ne pu s’empêcher d’avoir un sourire clairement moqueur à l’intention de son nouveau camarade. Puis, lorsque la jeune femme se tourna vers lui, Ian la laissa le détailler de la tête en pieds, un peu habitué depuis ses derniers jours bizarrement. C’est quand le regard de la brune passa sur sa main qu’il se rappela qu’il portait toujours sa bouteille de whisky. Entrer dans un bar avec une bouteille, voila qui avait de quoi vous attirer les foudres du proprio. Enfin de la proprio en l’occurrence.

Quand la jeune femme se remit a parler, se fut pour s’adresser à Gavriil et non pas à lui. Bien décidé à ne pas se laisser mettre à l’écart, Ian prit alors son voisin de vitesse.

Pourquoi ne pas le demander à moi directement ? Je sais parler et répondre aux questions, dit-il de sa voix caverneuse. Et je n’ai pas grand-chose d’un chaton, ajouta-t-il avec un semblant de sourire tout en penchant la tête sur le côté, son regard bleu plongé dans celui de l’inconnue.

mocking jay.

Gavriil grimaça en entendant le surnom dont l'affublait à chaque fois sa patronne. Il avait bien tenté de protester au début ! Mais rien à faire, elle avait décidé de l'appeler comme ça, et elle était têtue... D'accord il adorait les loukoums, et d'accord son frère lui en cuisinait souvent -et si ce n'était pas son frère c'était lui qui s'en faisait- mais ce n'était pas une raison ! Pourtant il devait avouer qu'au fond -vraiment tout au fond- il aimait bien ce surnom. Mine de rien, ça montrait qu'elle le connaissait bien... Et puis ça changeait du « hé toi ! » ou du « hé, l'étranger ! ».

-Tu sais bien que je peux pas me passer de toi, déclara-t-il en s'approchant langoureusement d'Eden avec une expression gentiment moqueuse.

Dès qu'il fut assez près, il en profita pour lui pincer discrètement la hanche pour se venger du surnom et pour la faire râler -surtout pour la faire râler. C'était devenu un petit jeu entre eux, celui de la séduction et de de qui ferait râler l'autre en premier. L'avantage de la brune, c'était qu'elle répondait toujours à ses provocations. Un peu trop même, parfois.

Il se tourna vers Ian. Celui-ci avait l'air de se demander ce qu'il faisait là... Et à en juger le regard qu'il lançait à sa bouteille, il avait remarqué qu'Eden n'approuvait pas les boissons autres que les siennes dans son bar. Mais étant donné que le russe avait sa propre bouteille dans la main, il ne pouvait pas dire grand chose. Il n'avait pas prévu d'aller au Helly Heaven à la base, et il n'allait pas abandonner une bouteille qu'il avait payé juste pour les beaux yeux de sa patronne ! Et il était sûr que l'ancien détenu avait le même point de vue que lui. Par mesure de précaution, il vida tout de même la bouteille d'une traite avant qu'elle ne tente de l'en débarrasser.

Il eut un sourire lorsque l'ancien détenu le devança pour répondre aux question d'Eden. Un mec avec un caractère comme ça, sûr qu'elle allait l'apprécier ! En tous cas, lui il l'aimait bien. Ça pouvait être un peu paradoxal étant donné qu'il était considéré comme un criminel, mais pour Gavriil, Ian avait l'air beaucoup plus honnête que la plupart des gens qui se disaient l'être.

-Oui voilà, je vous laisse faire les présentations, lança-t-il en s’éclipsant derrière le comptoir. Vous êtes assez grand pour le faire tout seul !

Il se baissa et attrapa ce qu'il cherchait : une des bouteilles de vodka cerise qu'il affectionnait tant. Il la déboucha, s'en versa un verre et regarda Ian et Eden qui se faisaient face avec un sourire. C'était assez explosif comme duo, il se demandait ce que ça allait donner. Son verre à la main, il se rapprocha.

-Pas vraiment un chaton. Il m'a débarrassé facilement d'un mec un peu trop collant... Tu cherchais un videur non ? Bah tu l'as.

La patronne savait se débrouiller très bien en matière de sort pour virer les fauteurs de troubles, mais certaines fois, ils étaient en sur-nombre, et dans ces moments là, un peu d'aide n'était pas de trop. D'autant plus que, lorsqu'il y avait beaucoup de clients, elle n'avait pas de temps à perdre à jeter dehors des ivrognes.

Il but une gorgée du liquide alcoolisé pour ménager son effet et s'étira nonchalamment, mettant en valeur sa fine taille -ce n'était pas tout le monde qui avait un tour de taille de 63 centimètres ! Autant le mettre en avant...

-Enfin, sauf si tu refuses, Ian, fit il avec un sourire.

Après tout, il en avait parfaitement le droit -il fallait être fou pour accepter de bosser avec deux timbrés comme Eden et lui. Pourtant, Gavriil se doutait bien qu'il ne devait pas être facile de trouver du travail après sa sortie de prison, et quelque chose lui soufflait que le brun avait aussi conscience de ça...